Traduction intralinguale, diglossie et essor des vernaculaires dans les cultures classiques et prémodernes en Asie orientale

Lanselle Rainier

Le projet « Traduction intralinguale, diglossie et essor des vernaculaires dans les cultures classiques et prémodernes en Asie orientale » est une collaboration internationale dirigée par deux sinologues : Rainier Lanselle, EPHE-PSL, CRCAO UMR 8155, et Barbara Bisetto, maître de conférences, Université de Milan-Bicocca.
Ce projet vise à étudier certaines pratiques textuelles des traditions de l’Asie orientale classique et prémoderne caractérisées par l’utilisation de ce qu’on peut globalement désigner sous le nom de traduction intralinguale. En Chine, de même que dans les cultures voisines (anciens empires d’Asie centrale et des régions altaïques, Japon, Corée, Vietnam), des types similaires de pratiques de l’écrit se constatent, dans lesquels la sémiologie du texte dépend non seulement du niveau explicite de son contenu, mais aussi de la dimension implicite des choix linguistiques qui ont été faits pour le porter. Citation, commentaire, transmission du savoir, genèse des récits, circulation des thèmes à travers des genres différents : dans toute une variété de domaines nous pouvons observer des phénomènes impliquant une forme ou une autre de re-sémantisation par réécriture.
Ces phénomènes se situent au cœur de questions souvent paradoxales. Quel est le statut réel de la traduction dans une zone culturelle — ladite « sinographosphère » — ou domine le présupposé d’une écriture idéalement fédératrice et insensible aux variations linguistiques régionales ? Qu’en est-il du prétendu caractère de lisibilité immédiée et de circulation fluide des textes entre des pays, et dans des pays, revendiquant l’usage d’une langue (chinoise) écrite réputée pour son incomparable stabilité diachronique ? Quel est le statut réel des vernaculaires dans des cultures qui en ont développé les usages en dépit des facteurs d’unification susmentionnés, qui auraient dû les dissuader ? Qu’en est-il des niveaux prétendument « élevés » ou « inférieurs » dans les situations diglossiques ou pluriglossiques ? Comment distinguer, quelquefois, le commentaire d’autres formes de re-sémantisation, telles que réécriture, reformulation, amplification, traduction à part entière, ou remaniements entre genres ?
La stratégie générale du projet vise à faire converger des contributions hautement spécialisées, chacune axée sur un aspect particulier des problématiques susmentionnées. Les contributions intéressent l’ensemble de la zone culturelle Asie orientale sur une périodicité longue, car c’est dans ce cadre que l’on fera le mieux ressortir des phénomènes communs aux traditions écrites considérées, lesquels exigent la prise en compte de toute une profondeur temporelle, spatiale, linguistique et textuelle.
Dans le cadre de l’IRIS SCRIPTA-PSL, le projet a déjà généré un séminaire pluriannuel transversal (dans sa deuxième année en 2017-2018, une séance mensuellement), visant à étendre l’étude et la confrontation de phénomènes similaires dans des contextes culturels et historiques dépassant les limites de la zone Asie orientale. (Voir le site du séminaire : https://diglossintral.sciencesconf.org .)

 

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