Guermeur Ivan
Le présent projet entend étudier la matérialité et les aspects socio-linguistiques de l’emploi de l’ostracon comme support d’écriture à partir d’un ensemble de documents découverts à Athribis, en Haute Égypte, jusqu’ici inédits. Ceux-ci, datables entre le Ier s. AEC et le VIIe s. EC, sont majoritairement inscrits en égyptien (hiératique et démotique, ± 80%) et en grec (± 16%), on compte aussi quelques pièces avec du copte, de l’arabe et des dessins. Il s’agira d’une approche interdisciplinaire de l’étude des ostraca, tant sur le plan des philologies (égyptien de tradition, démotique, copte, grec et arabe) qu’en faisant appel à d’autres disciplines comme la céramologie. L’étude céramologique abordera les différents aspects de la matérialité des tessons inscrits (mesures, analyse des pâtes, type de céramique, parties utilisées, origines en Égypte et au-delà, datation), ce qui permettra de déterminer si des formes, tailles, types ou parties de céramiques ont été privilégiés comme support, peut-être même en fonction de la nature des textes que l’on voulait écrire. À partir de ces constatations on s’interrogera sur les choix opérés par les scribes, étaient-ils conscient ou répondaient-ils à diverses contingences ? Dans un second volet de questionnements, piloté par les philologues, on étudiera la fonction des textes inscrits sur ces supports et on essayera de déterminer les motivations de l’emploi de tessons de céramique par rapport au papyrus et de préciser la nature des producteurs et des utilisateurs. On spécifiera aussi dans cet ensemble les types de texte qui sont inscrits sur ostraca et on effectuera des comparaisons avec d’autres sites en Égypte. Pareillement, il faudra considérer les types de texte qui sont connus ailleurs mais absents à Athribis et inversement ceux d’Athribis qui ne sont pas, ou peu, attestés ailleurs, ou du moins pas sur ostraca. Il s’agira donc d’essayer d’établir les raisons pour lesquelles ces différents types de textes ont été rédigés sur des tessons : étaient-ils réellement un substitut économique au papyrus, souvent communément considéré comme onéreux (ce qui doit être relativisé) ? Les tessons sont-ils réservés à des textes de moindre importance et/ou d’un usage éphémère ? Cela consistera aussi à préciser dans quelle mesure la rédaction sur ostraca influence la forme du texte (mise en page, longueur du texte, taille des signes, etc) ; les circonstances qui conduisent à privilégier l’usage du hiératique, du démotique ou du grec (et plus tard, du grec ou du copte, voire du copte ou de l’arabe) et si certains types de textes sont uniquement attestés dans une seule langue/écriture. Enfin, dans le contexte de l’environnement d’un sanctuaire égyptien, il faudra déterminer qui sont les rédacteurs et les destinataires des textes inscrits sur tessons et le rôle que pouvaient jouer ces personnes au sein de l’institution religieuse, sociale et économique qu’était ce temple à l’époque gréco-romaine, puis le couvent qui y était installé dans les phases ultérieures de son occupation.